La chienne truffière déterre
du sol sec deux "diamants noirs", aussi minuscules que ces pierres précieuses. "Elles sont si petites!", se désole Christine Dupaty, en remplissant à peine le creux de sa main. "C'est la sécheresse
et c'est de pire en pire. La truffe de Bourgogne risque de disparaître".
Cette trufficultrice, par
ailleurs vice-présidente de l'Association régionale des truffes en Bourgogne-Franche Comté (ARTBFC), a
planté sa truffière de 2.500 chênes, noisetiers et autres charmes en 2006 à Terrefondrée (Côte-d'Or). Mais "jamais", elle n'en a vu autant "en train de mourir". "Surtout le charme" aux racines
"très porteuses de truffes", dit-elle en montrant des troncs gisant dans sa
forêt.
"Des arbres de 80-100 ans
crèvent. On dirait que des bombes sont tombées sur la forêt", acquiesce Fabrice Balleret. Le chef cuisinier croyait ses 800 arbres truffiers à l'abri car plantés dans "le bec d'Allier", un plateau de
la Nièvre où la Loire toute proche apporte une certaine humidité.
"Mais j'ai vu le niveau de la
Loire énormément baisser en 5-6 ans. On a eu pratiquement des sécheresses tous les ans depuis cinq ans, sauf en 2021", dit M. Balleret.
La forêt va mal. Et la victime
collatérale est la truffe de Bourgogne.
"Je récoltais 3 kilos
de truffes de Bourgogne il y a 5 ans, et un tiers seulement cette année", calcule M. Balleret, également contrôleur national
des marchés aux truffes.
Cette truffe de couleur sombre
se récolte en automne et a donc particulièrement besoin d'eau en été. Elle est donc plus sensible au réchauffement que ses cousines: la truffe du Périgord, dite "noire", se récolte, elle, en hiver,
pouvant ainsi bénéficier des pluies d'automne; et celle d'été, dite "blanche" ou truffe "d'Italie", a plus de chance de profiter des pluies du printemps.
- 600 euros
le kilo -
"Sans eau, la truffe de
Bourgogne n'est rien", explique Mme Dupaty. "Cette année encore, les truffes sont rabougries", dit-elle en sortant de
l'humus des pépites qui n'atteignent même pas les 5g minimum requis pour la vente.
Les paniers d'osier se vident
sur les marchés aux truffes qui se succèdent pendant les weekends
d'automne en Bourgogne et les prix s'envolent au-delà des 600 euros le kilo.
"Ca commence à faire cher
l'omelette aux truffes!", lance un habitué sur les étals de Noyers-sur-Serein (Yonne), une des capitales de la truffe de
Bourgogne.
L'an dernier, année de sévère
sécheresse qui avait ravagé la production locale, Noyers-sur-Serein avait autorisé la vente de truffes... du Périgord,
faute de "mieux". Un "sacrilège" pour nombre de trufficulteurs régionaux.
"Il arrivera un moment où on
n'aura plus de Bourgogne, et seulement de la Périgord", se désespère Mme Dupaty, également vice-présidente de la Fédération française des trufficulteurs.
Le diamant noir de Bourgogne
représente en moyenne un quart des quelque 40 tonnes produites annuellement chaque année en France, selon des estimations.
Patrice
d'Arfeuille, président du syndicat des producteurs de truffes de Bourgogne, croit cependant qu'il est
encore temps de sauver l'espèce. "Mais il faut s'adapter", estime-t-il.
Armelle Rion, une
responsable de la Confrérie de la truffe de Bourgogne, a, par exemple, choisi de planter dans ses 6 ha de truffière à Vosne-Romanée (Côte d'Or) "des essences plus résistantes à la chaleur, comme le
chêne vert et les cèdres de l'Atlas".
Parallèlement, l'ARTBFC teste
un projet-pilote de truffière plantée en zone inondable, à Leuglay (Côte d'Or). Cette irrigation naturelle représenterait une alternative à l'arrosage, de plus en plus
problématique.
"A quoi ça sert si on ne peut
de toute façon plus arroser à l'avenir?", souligne Mme Rion, en référence aux interdictions préfectorales de plus en plus fréquentes d'irriguer l'été, dues justement au manque d'eau dans la
région.
"Si on ne peut pas irriguer,
je ne parierais pas sur l'avenir de la truffe de Bourgogne", dit-elle.
La canicule de l'été 2015 a porté un coup de massue aux trufficulteurs de l'Hexagone. Résultat, la production française a quasiment été divisée par deux, poussant les marchés aux
truffes à fermer prématurément dans la saison.
Le précieux diamant noir va-t-il se raréfier dans les assiettes? Le marché aux
truffes du Tricastin, situé à Saint-Paul-Trois-Châteaux
au sud de la Drôme, va cesser ses activités ce dimanche, au lieu de la mi-mars comme prévu initialement. En cause, une production en berne. Pour Michel Tournayre, président de la Fédération Française
des Trufficulteurs (FFT), «
la sécheresse estivale affecte l'ensemble des producteurs de l'Hexagone». Une filière estimée à 20 000
personnes.
Lors de la campagne 2014-2015, les régions Languedoc-Roussillon, Provence-Alpes-Côte-d'Azur et Rhône-Alpes avaient produit jusqu'à 40 tonnes de Tuber melanosporum, dite «truffe noire du
Périgord». Mais l'année en cours est jugée catastrophique. Au marché de gros de Richerenches, dans le Vaucluse,
les quantités de truffes sont tombées drastiquement. «La semaine passée, nous avions 300 kilogrammes alors qu'en temps normal, nous comptons une tonne de truffes», explique Bernard Duc-Maugé,
directeur de la Maison de la truffe noire du Tricastin, au Figaro. «Pour l'heure, nous estimons que 30 tonnes ont été produites contre plus de 50 l'an passé, en France», soutient Michel
Tournayre, également trufficulteur à Uzès.
«Au kilo, la truffe noire coûte 850 euros sur le marché de gros»
Une situation dont pâtit également une autre espèce, la truffe de Bourgogne, Tuber uncinatum. «Personnellement, j'ai produit 100 grammes contre 6 kilos l'année précédente: c'est soixante
fois moins!», nous confie de son côté Patrice d'Arfeuille, président du Syndicat des producteurs de truffes de Bourgogne.
Le responsable? La météo catastrophique. «Nous avons été confrontés à une période de sécheresse sans précédent, ce qui a empêché les truffes de se développer», déplore le président de la FFT. De fait, l'eau est une denrée essentielle tout au long du
cycle de vie de la truffe, de sa naissance, en mai, à la récolte jusqu'en février, selon les espèces.
Qui dit raréfaction, dit forcément hausse des prix. «Pour la truffe de Bourgogne, les prix ont été multipliés par deux», affirme Patrice d'Arfeuille. Quant à la truffe noire, les prix ont augmenté
de 100 à 200 euros, selon les estimations de la Fédération. «Sur le marché de gros, ils se sont accrus de 30%», précise Bernard Duc-Maugé. «Au kilo, la truffe coûte environ 850 euros». Si le prix
semble exorbitant, pour les acteurs de la filière, il est nécessaire de conserver un prix minimum pour cette denrée si rare, car le métier de trufficulteur représente un travail considérable. «La
première récolte s'effectue entre neuf et dix ans», précise Patrice d'Arfeuille.
Les arômes artificiels, «une forme d'escroquerie»
«Dans le même temps, nous devons tout de même garantir une production et des prix “raisonnables”, sans quoi la concurrence va en profiter», reconnaît Michel Tournayre. L'Espagne et l'Italie
constituent actuellement les deux concurrents majeurs de la France. Mais les trufficulteurs de l'Hexagone sont également confrontés à un autre adversaire. «Quarante tonnes de truffes chinoise
arrivent chaque année en France», soutient Bernard Duc-Maugé. «Contrairement à la truffe française, elle n'a aucun goût, mais comme elle est moins chère, elle satisfait de nombreux
restaurateurs».
»» Lire aussi: Le terroir ne fait pas tout l'arôme
de la truffe
Autre ennemi des trufficulteurs: la chimie. «Les trois-quarts des produits dérivés de la truffe sont produits à partir d'arômes artificiels», allègue le président de la FFT. Huile, vinaigre,
moutarde... Autant de produits qui satisfont les clients et notamment les restaurants, pour leurs prix. «C'est une forme d'escroquerie», assène le fondateur de la Maison de la Truffe. «Le véritable
souci, c'est que les consommateurs ne sont pas capables, par la suite, de différencier le vrai et le faux goût de la truffe». Plusieurs exploitants ont d'ailleurs prévu de faire le déplacement au
Salon de l'Agriculture, qui débute ce samedi, à Paris, avec l'objectif de rétablir la vérité sur le fameux diamant noir.
Le Figaro.fr, Pauline Chateau
http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2016/02/28/20002-20160228ARTFIG00001-les-prix-de-la-truffe-explosent-en-france.php
Le Journal du Centre du 22 octobre 2012
Photo du marché aux Truffes de Bourgogne de Nevers du 20 octobre 2012 organisé par le Syndicat des Producteur de Truffes de Bourgogne et le Conseil de Quartier Centre de Nevers.
Le JDC, 12 octobre 2012
Journées découverte de la Truffe de Bourgogne organisées à Clamecy et sa région par le Syndicat des Producteurs de Truffes de Bourgogne, l'Hôstellerie de La Poste (Clamecy), Jean-Luc Barnabet
Conseil et le Syndicat d'Initiative de Tannay. Au programme café d'accueil, exposé sur la truffe de bourgogne, cavage (recherche de truffes) en truffière, exposé gastronomique, appéritif et repas à
la truffe de bourgogne.
Le JDC, 21 septembre 2013
Journées découverte de la truffe de Bourgogne et marchés aux truffes de bourgogne organisés par le Syndicat des Producteurs de Truffes de Bourgogne, pour les consulter cliquer sur l'onglet
"marché".
Pour visionner le replay du FR3 Bourgogne sur la Truffe de Bourgogne, allez sur http://bourgogne.france3.fr/ et cliquez sur le 19/20 du 24 septembre à la 14ème minute environ.